Sund ! flots abrutis par les autans inconstants, nostalgies bornées par les bureaux très quotidiens du Fortimbras d’en face !…
C’est pourquoi (sauf orages) ce coin d’eau est bien le miroir de l’infortuné prince Hamlet, en sa tour paria, en sa chambre aux deux fenêtres vitrées de jaune, dont l’une montre en gris souillé les ciels, le large et l’existence sans issue, et l’autre est ouverte à la plainte perpétuelle du vent dans les hautes futaies du parc. Pauvre chambre tiraillée ainsi au sein d’un inguérissable, d’un insolvable automne ! Même en juillet, comme aujourd’hui. C’est aujourd’hui le 14 juillet 1601, un samedi ; et c’est demain dimanche, dans le monde entier les jeunes filles iront ingénument à la messe.
Aux murs, une douzaine de vues du Jutland, tableaux impeccablement naïfs, commandés jadis à un peintre aux galères, et dont chaque pièce du château utilise ainsi sa bonne douzaine. Entre les deux fenêtres, deux portraits en pied : l’un, Hamlet, en dandy, un pouce passé dans sa ceinture de cuir brut, le sourire attirant du fond d’une pénombre sulfureuse ; l’autre, son père, bardé d’une belle armure neuve, l’œil coquin et faunesque, feu son père le roi Horwendill, irrégulièrement décédé en état de péché mortel et dont Dieu ait l’âme selon sa miséricorde bien connue. Sur une table, dans le jour d’insomnie des vitres jaunes, un laboratoire d’aqua-fortiste irrémédiablement rongé de sales oisivetés. Un fumier de livres, un petit orgue, une glace en pied, une chaise longue, et un buffet à secret (il a peur d’être empoisonné, depuis le louche décès de son père). Dans la chambre