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d’inquiétude. Ma tante ne l’ouvrit cependant qu’avec le plus grand trouble, et nous apprit enfin que ma mère remettait son voyage, et qu’il ne fallait pas compter sur elle ce jour-là.

Je regagnai le jardin. J’allai sans savoir jusqu’à la charmille, sur le banc de laquelle je m’assis. Les cloches battaient encore, mais ma joie morte ne leur prêtait plus de voix ; le paysage, baigné de lumière affaiblie, se découvrait tout entier, à travers les arbres dépouillés. Soudain, je m’entendis appeler dans le jardin… Je ne répondis pas, un second appel retentit en vain ; puis une porte se referma ; on ne me chercha pas davantage.

Quand plus tard je rentrai, j’appris que ma tante et Mlle  Aurélie s’étaient fait conduire à la ville. Je m’assis dans la cuisine où Segonde réparait le désordre du repas. Elle retira du feu l’eau qu’elle y avait mis chauffer dans une lourde bouilloire, et l’emporta au réduit voisin où je l’entendis bientôt remuer les plats et les assiettes qu’elle lavait. Une fine buée voilait les carreaux