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bougie éteinte, le dos tourné au vide de la chambre où, parfois, cependant, un meuble craquait. Le sommeil venait bientôt me prendre, mais pour m’être encore bien redoutable. Aux cauchemars habituels où nos pieds se refusent à la fuite, où l’on choit dans un vide sans fin, il s’en ajoutait un plus terrible ; ma mère m’y apparaissait mystérieusement réprobatrice, avec un regard froid que je ne lui connaissais pas ; ma tristesse, l’affirmation de mon innocence ne pouvaient rien contre sa rigueur, je suppliais vainement, et finissais par m’éveiller en larmes. Il m’arrivait encore de me revoir chez mes parents, heureux et jouant avec des cubes que je m’amusais à échafauder de mon mieux ; tout d’un coup, la muraille ainsi construite oscillait et menaçait ruine, et je demeurais terrifié à l’idée du bruit qui allait suivre, et de l’apparition possible de mon père. Je me retrouvais en sueur, haletant… Le silence semblait bruire, la pluie ruisselait sur les branches, un grand vent emplissait l’espace,