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sphère indisposait. Nous en étions quittes, parfois, pour de sourds roulements dans le ciel obscurci, mais des orages éclatèrent à plusieurs reprises et nous causèrent de réelles frayeurs.

L’un d’eux atteignit une grande violence. Toute la matinée avait été lourde, mais ce fut seulement vers quatre heures que la tempête se déchaîna. Un subit crépuscule s’abattit sur la campagne, et la foudre déchira la nue, suivie d’immédiates détonations. Nous nous hâtâmes de gagner l’intérieur et de clore la maison ; ma tante aurait même voulu tirer les volets de la petite salle ; la peur de faire entrer l’orage la retint ; elle se contenta de tourner son fauteuil vers la cheminée et de se couvrir la face en se signant à chaque éclair. Mon père ayant, par hasard, souhaité demeurer seul, ma mère continuait de travailler près de nous avec un visage placide qui éloignait un peu la crainte de mon cœur ; mais Segonde, assise au foyer, tenait son chapelet et récitait, pour chaque grain, une