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somnolence devînt plus forte pour qu’ils montassent à mes lèvres et que je fusse agité de leur souvenir. Mes yeux s’ouvraient alors subitement, je me dressais comme pris en faute, et retombais souriant de revoir autour de moi le décor familier. Les poules caquetaient dans le silence, la feuillée bruissait comme une mer lointaine ; sur les coteaux, au soleil, dormaient les belles couleuvres que sont les routes tachées d’ombre. Le calme de l’heure m’apaisait.

Mon père se montrait peu ; il sortait de grand matin dans la campagne et sommeillait durant le jour. Il travaillait fort longtemps chaque soir à un ouvrage de composition musicale qui le prenait tout entier. Mes nuits étaient sereines. Segonde qui occupait la mansarde au-dessus de ma chambre, s’inquiéta d’abord de m’entendre me débattre, appeler des camarades et parler haut dans mon sommeil ; mais, peu à peu, les mauvais songes me laissèrent, et je tombai dans un grand oubli des derniers jours. Je ne fermais