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refuge qui me restât, et, sans rien sentir de l’ardeur de la journée, je me pris bientôt à courir. La route était longue ; je dus m’arrêter plusieurs fois. Le souffle me manquait quand j’aperçus le toit que je souhaitais ; un nouvel effort me porta jusqu’aux vignes parmi lesquelles je m’engageai ; j’atteignis le portail et pris l’allée ; je vis ma mère sous les arbres, je l’appelai et me jetai dans ses bras.

Ce furent trois jours de fièvre et de délire, où l’on craignit que mon cerveau ne résistât point, et qui ne me laissèrent d’autre souvenir que celui d’un réveil apaisé dans le demi-jour d’une chambre où mon premier appel fit se lever ma mère. Les prix étaient donnés depuis la veille ; on me montra sur la table le livre rouge et la couronne de papier vert que mon travail m’avait valus. Le Collège fermait ses portes ; ma mère m’embrassait avec tendresse, je me sentis délivré. Il n’y avait plus en moi que le bonheur de me retrouver à La Grangère et le désir de m’étendre à l’ombre, tout seul et longtemps, dans le jardin.