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l’une d’elles cria : Fils de fou ! … Je frappai. À droite, à gauche, des pieds et des poings, la tête baissée, je frappai. Une sorte de rage m’avait saisi ; je ne sentais plus les coups reçus ; j’en donnais. Il me semblait que l’ennemi n’avait qu’un visage, celui de Rupert ou de Bereng, que je massacrais sur tous les autres. Mais le nombre m’écrasait : La chaîne rompue, les mains libérées m’atteignaient de toutes parts et me forcèrent de reculer. Je me trouvai soudain adossé à la porte du vestibule, elle céda ; je roulai dans le couloir. En me relevant, je vis, au fond, la grande porte entr’ouverte ; j’y courus et m’élançai…

La rue qui m’apparut déserte au soleil de quatre heures n’arrêta pas mon élan ; elle menait à la campagne, je la suivis d’un pas précipité. Mes oreilles tintaient encore des injures reçues, mes joues brûlaient ; mes mains gonflées étaient rouges, j’étais nu-tête. La peur d’être rejoint me fit hâter la marche ; je m’orientai vers La Grangère, seul