Page:Lafon - L’Élève Gilles, 1912.pdf/195

Cette page a été validée par deux contributeurs.

que nous fussions sortis pour m’en donner connaissance par signes ; et c’était entre nous une télégraphie à quoi les autres ne comprenaient rien. Un après-midi de chaleur excessive, le professeur d’histoire nous sentant distraits, fit lire à haute voix quelques anecdotes. L’une d’elles me frappa, qui relatait l’aventure du roi Charles VI dans la forêt du Mans. La porte ouverte sur la cour laissait voir les feuillages ensoleillés sous lesquels palpitait une ombre dense ; les oiseaux se taisaient, mais les cigales ne cessaient pas de faire entendre leur crissement. Daunis, à mon côté, les yeux lourds, se laissait glisser entre le banc et la table ; ses cheveux lui couvraient à demi l’oreille ; j’imaginais d’après son profil les Pages de la suite royale, et je voyais Charles VI s’avancer pesamment. Soudain, l’homme demi-nu s’élançait d’entre les branches… « Arrête, noble sire, tu es trahi ! » La chevauchée interrompue reprenait dans la torpeur d’un jour semblable, sans doute, à celui qui nous accablait ; puis c’était l’éclair