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levant de traînées pourpres dont les milliers de gouttelettes couvrant le verre s’irisaient. On bâillait dans l’air lourd d’haleines mêlées, et, bien que le maître y veillât, certains ne s’étaient mouillé qu’à peine la figure à l’ordre donné de descendre. Beaucoup d’entre nous pourtant se lavaient bien ; et cela même empêchait les autres. Bereng, Méjean, Terrouet, malgré des punitions reçues pour ce motif, retournaient les robinets de telle sorte que l’eau jaillît sur leur visage qu’ils frottaient à deux mains. Rupert, enfilant sournoisement ses culottes avant le signal du lever, se trouvait des premiers au lavabo, ainsi que quelques autres qui usaient aussi de ce stratagème ; la chemise ouverte, les manches troussées, il se couvrait de savon les bras, le cou, la face, la tête et gardait tout le jour, jusque dans ses cheveux ras, une odeur de lessive. Le grand Charlot craignait l’eau froide ; son frère se faisait un masque de mousse savonneuse et grimaçait pour qu’elle n’entrât pas dans ses yeux ni dans sa bouche. Il fallait surveiller