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Semaine Sainte, un peu plus de silence sembla descendre sur les champs ; la petite ville où il m’arriva d’accompagner ma tante pour le Salut ou l’office du soir, me parut elle-même pénétrée de recueillement. Je la crus déserte, le Vendredi et le Samedi saints ; il faisait gris, un grand vent nous forçait de baisser la tête, c’est à peine si nous rencontrâmes quelques femmes se rendant comme nous aux Ténèbres ou au Chemin de Croix ; leurs pas discrets s’entendaient dans la rue où des boutiques étaient closes. Nous priâmes devant le Christ voilé d’un losange violet. Les cloches ne tintaient plus : « Elles sont à Rome, m’avait dit Segonde, il faut se lever tôt pour les voir partir ». J’étais demeuré sans réponse, à cause du souvenir de Noël et de ses prétendus cadeaux, mais tant de silence me frappait. Les seules ressources de la maison suffisaient à composer nos repas ; ma tante dînait d’une collation de confiture et de laitage. Je crois qu’elle ne mangea pas, le jour du Vendredi Saint ; elle