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qu’elle faisait. Elle l’avait confié, tout petit, à un parent dans les Landes, et ne put de longtemps l’y aller chercher. Quand elle revint, Charlot l’appela « Mademoiselle » et s’étonna de la voir pleurer ; elle l’envoya rejoindre l’aîné au Collège. Elle les y surprenait quelquefois de sa visite ; je pus la connaître, un jeudi, dans la cour où elle s’était avancée ; les Grands se la montraient des yeux et souriaient en parlant bas.

Le goûter terminé, nous regardions entre les branches le paysage calme du dimanche ; Charlot faisait aller ses jambes sous le banc et les dents rapprochées, susurrait une polka qu’il aimait. Soudain, je m’aperçus qu’un œuf oublié dans ma poche venait de s’y briser. Nous nous entendîmes pour n’en rien dire, mais nous eûmes devant ma tante de tels regards de complicité, que je dus avouer ma maladresse et livrer ma veste au nettoyage. Chaque fois ensuite qu’on nous servit des œufs au réfectoire, Charlot ne manqua pas de me faire signe en souriant, parce qu’ils