Page:Laffitte - Le grand malaise des sociétés modernes et son unique remède.djvu/63

Cette page a été validée par deux contributeurs.

pouvez vous coucher sur votre terrain et y fumer votre pipe ; vous pouvez vous promener tout autour, comme le lazzarone de Naples ou le lepero de Mexico ; vous pouvez planer au-dessus en ballon ou dormir au-dessous dans un trou : sans remuer le doigt, sans ajouter un iota à la richesse générale, dans dix ans vous aurez fait fortune. Dans la cité nouvelle il y aura un palais pour vous. Il est vrai qu’il y aura aussi probablement un hospice pour les pauvres. »

À vrai dire ce moyen de faire fortune est aussi ancien que la propriété perpétuelle. La plupart des vieilles fortunes du monde n’ont pas d’autre cause. C’est la possession prolongée depuis la conquête normande qui a fait les plus grandes fortunes territoriales d’Angleterre. La possession prolongée, il n’est pas de formule plus certaine pour faire fortune ; il n’en est pas non plus de moins pénible. On pourrait dire, en transposant un mot heureux de Charles Gide, que le propriétaire est roi, mais que c’est un roi fainéant.

Qu’a-t-il fait, le propriétaire de terrains, si ce n’est attendre et s’abstenir de bâtir ? Des fortunes colossales se sont faites de cette façon, après un acte d’accaparement du sol dans la périphérie d’une grande ville, par la simple force d’inertie qui a soustrait pendant longtemps des terrains aux constructions et qui a maintenu

62