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La République fut sauvée pour un temps, car la loi demeura en vigueur pendant plus de deux cents ans. « Le siècle qui suivit les lois liciniennes, écrit Laboulaye, est celui où Rome semble inépuisable en soldats. Varron, Pline, Columelle se reportent sans cesse à ces beaux jours de la République comme au temps où l’Italie était vraiment puissante par la richesse de son sol, le nombre et l’aisance de ses habitants ; la loi des 500 jugères est toujours citée par eux avec honneur, car, la première, elle avait reconnu le mal et essayé le remède, en retardant la création de ces grands domaines, de ces latifundia qui dépeuplèrent l’Italie et, après l’Italie, l’empire tout entier. »

Malheureusement, après la conquête de la Macédoine, les clauses de la loi Licinia ne furent plus guère appliquées[1]. Les Gracques s’efforcèrent de la faire revivre : ces politiques clairvoyants tentèrent d’arrêter l’abandon de la terre et l’exode vers Rome de cette forte race de cultivateurs-soldats qui avaient donné à Rome l’empire du monde ; mais les patriciens parvinrent à éluder dans l’exécution toutes les lois qu’on opposait à leur avidité. D’autre part, les conquêtes mettant à leur disposition des

  1. La fureur d’accaparer était telle que, vingt ans seulement après l’application de la loi Licinia, le tribun Licinius, qui en était l’auteur, avait été condamné pour l’avoir violée, en prenant, sous le nom d’autres citoyens, des terres au delà de la quantité légale.
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