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tutifs du droit de propriété et montré que la propriété n’était pas instituée seulement dans l’intérêt de l’individu et pour lui garantir la jouissance des fruits de son travail ; mais qu’elle l’était aussi dans l’intérêt de la société et pour en assurer la durée et l’action utile. Obéissant à sa première condition de souplesse, le droit de propriété doit se modeler à la double image de l’homme, qui agit à la fois comme individu isolé, ayant ses droits d’homme libre, et comme citoyen et membre de la société, avec ses obligations et ses devoirs collectifs. En transférant à la propriété individuelle la jouissance perpétuelle, le droit romain et, après lui, les divers droits modernes ont complètement faussé la conception sociale de la propriété ; par l’exclusion d’un des éléments constitutifs du droit de propriété ils ont brutalement sacrifié le droit de tous au privilège d’un seul.

Il n’est pas étrange qu’une pareille « lésion » ait eu des répercussions énormes. Le droit de propriété, naguère mouvant, est devenu rigide ; il provoquera des révolutions qui briseront sa rigidité en supprimant le bénéficiaire de ce privilège injuste. Aucune révolution n’a eu d’autre cause ; toutes les menaces de l’avenir sont enfermées dans cette gigantesque lésion. « Pour les législateurs, écrit Aristote dans sa Politique, le point capital paraît être l’organisation de la propriété, source unique, à leur avis,

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