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Et cependant la propriété privée fut un progrès sur la propriété collective, de famille, de clan ou de commune. Elle fut un progrès par cela même qu’elle faisait disparaître les deux principales causes de débilité de toute communauté : affaiblissement du ressort de l’activité, puisque tous, paresseux ou laborieux, jouissent des mêmes avantages ; diminution de l’esprit d’initiative, puisque le profit de toute amélioration se partage entre tous.

Progrès indéniable si la propriété se fût contentée d’être individuelle ; mais le Romain, cruel jusque dans l’état civil, selon l’expression de Montesquieu, fit une loi à son image : autoritaire, il lui conféra le droit d’user et d’abuser ; avide, il accapara pour elle la perpétuité.

Forgée brutalement, cette loi révélait une méconnaissance complète de ce qu’on peut considérer comme la seconde « condition » du droit de propriété : l’obligation de satisfaire à la fois aux deux éléments que l’analyse a découverts dans le droit de propriété, l’élément social et l’élément individuel.

« La propriété, écrit Alfred Fouillée, a une portion individuelle et une portion collective, et le problème social est de limiter le droit de chacun par le droit de tous. »

Avant Fouillée, Emmanuel Fichte, en Allemagne, et don Francesco de Cardenas, en Espagne, avaient dégagé ces deux éléments consti-

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