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MOLIÈRE.

prononcer sur cette matière ; mais il est très assure, Sire, qu’il ne faut plus que je songe à faire de comédie si les Tartufes ont l’avantage, qu’ils prendront droit par là de me persécuter plus que jamais, ils voudront trouver à redire aux choses les plus innocentes qui pourront sortir de ma plume.

Le roi reçut très bien les deux messagers. « Monsieur nous protégea à son ordinaire, et Sa Majesté nous fît dire qu’à son retour à Paris, Elle ferait examiner la pièce et que nous la jouerions. Après quoi, nous sommes revenus. Le voyage a coûté 1 000 livres à la troupe. » Malheureusement, le retour du roi se fit attendre. Dès le 11 août, l’archevêque de Paris avait lancé une ordonnance interdisant « à toutes personnes du diocèse de représenter, lire ou entendre réciter la susdite comédie, soit publiquement, soit en particulier, sous quelque nom et prétexte que ce soit et sous peine d’excommunication ». Une entrevue de Molière avec le Président de Lamoignon, ménagée par Boileau, n’obtint aucun adoucissement. Lors du retour du roi, le 7 septembre, Molière, profondément découragé, repris par ses maladies, épuisé par la lutte, sembla prêt, en effet, à exécuter sa menace, à se retirer du théâtre. Le Palais-Royal resta fermé durant sept semaines. C’est le 25 septembre seulement que, sur les instances de ses amis, il se décida à le rouvrir avec le Misanthrope.

Il semble que, cette fois encore, malgré l’interdiction maintenue pour le Tartuffe, il ait été relevé, dans son abattement, par quelque assistance royale. Et lorsqu’après quelques mois de retraite laborieuse, ragaillardi, comme d’habitude, et surexcité par les épreuves, il montra n avoir rien perdu de sa verve en donnant Amphytrion, à la ville et à la cour, pour