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la grande lutte.

sous son vrai nom, reparut, en appel, devant le juge le plus autorisé. L’Éminence, accoutumée aux libertés italiennes, marqua sa satisfaction par un fin sourire, qui devint bientôt, dans un placet, « l’approbation de M. le Légat et de MM. les Prélats ».

Après cette consultation, tout le monde sut que penser de la défense royale. C’est à qui, prince, seigneur, gros bourgeois, invitera chez lui Molière, soit pour une représentation, soit pour une lecture. Pas de belle réunion, pas de bon repas sans lui :

Molière, avec Tartuffe, y doit jouer son rôle.

Ceux même qui semblent ses victimes les plus nettement visées et les mieux atteintes, jésuites et jansénistes, se laissent tenter par la curiosité. Le 26 août, une représentation chez une des nobles protectrices de Port-Royal, Mme de Longueville ou Mme de Sablé, ne fut suspendue que par la coïncidence du plus fâcheux contretemps : ce jour-là même les agents royaux procédaient à l’expulsion des Vénérables Mères de la sainte maison. Des représentations ou lectures furent données chez l’académicien Montmaur, Ninon de Lenclos, Monsieur, frère du Roi, Madame, sa belle-sœur, « dans un temps où Sa Majesté était irritée contre les dévots de la Cour et quelques prélats qui s’étaient avisés de lui faire des remontrances au sujet de ses amours ». Plusieurs se succédèrent chez le grand Condé qui, dès le premier jour, avait pris hardiment la défense de Molière.

Huit jours après que l’Imposteur eut été défendu, on représenta devant la Cour une pièce intitulée Scaramouche ermite,