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jeunesse et apprentissage.

la fois par sa vocation impérieuse pour l’art dramatique et par sa passion pour Madeleine.

Y-eut-il, à Montfrin, entre la comédienne et le jeune tapissier, encore novice, un coup de foudre qui lia des lors leurs existences ? Est-ce seulement au retour, à Paris, que s’opéra la liaison par toutes sortes d’affinités d’intelligence et d’ambitions ? Peu importe. Toujours est il que, le 3 janvier 1643, quelques jours avant ses vingt et un ans, le jeune homme avertit par écrit son père qu’il renonçait à la charge de tapissier royal, Il le priait d’en assurer la survivance à l’un de ses cadets. En même temps il sollicitait « tant sur ce qui pouvait lui appartenir de la succession de sa mère, qu’en avancement d’hoirie future », la somme de 830 livres « pour l’employer à l’effet mentionné ». Quel effet ? Une association pour une entreprise dramatique avec la Béjart, son frère Joseph, sa sœur Geneviève, et quelques uns de leurs amis. La Troupe prenait le nom d’« Illustre Théâtre ».

Que le père Poquelin, que sa famille, que son entourage aient poussé les hauts cris à l’annonce de cette équipée, quoi de surprenant ? Observations, supplications, lamentations, tout échouait devant l’entêtement du jeune homme. En désespoir de cause, Jean Poquelin aurait même prié Jean Pinel, un vieux maître de Jean-Baptiste, d’intercéder auprès de son élève, Pinel avait accepté la mission, mais, à la suite d’un entretien (résultat imprévu, déplorable et grotesque !) ce lui le magister, converti par le disciple, qui s’engagea lui-même dans la troupe pour u jouer les pédants. D’autre part, chez les Béjart, la situation devenait chaque jour