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MOLIÈRE.

incestes et marier les amoureux. On croit entendre le cri brusque du gardien annonçant l’heure de la clôture, à la porte d’un musée : « Allons, Messieurs, on ferme, on ferme ! » Et tout le monde s’embrasse par des reconnaissances extravagantes, agencées à la diable, comme dans l’Étourdi, l’École des Maris, l’École des Femmes, etc., etc….

Ce n’est point par le seul Corneille que la tâche lui avait d’abord été bien préparée. De 1630 à 1660, au théâtre, comme dans la poésie et le roman, c’est une fièvre de création extraordinaire , une émulation féconde entre les indépendants, traînards de la Renaissance, et les réguliers, préparateurs du Classicisme, entre la préciosité et l’idéal romanesques des Salons littéraires et le réalisme et la parodie burlesques chers aux bourgeois et provinciaux. Quelques-uns des auteurs comiques étudient déjà avec plus de sympathie les divers milieux sociaux, et donnent aussi plus d’importance à la représentation des caractères. Certains titres même nous indiquent la prétention de créer des types : l’Esprit fort, par Claveret (1629) ; les deux Comédies des Comédiens, par Gougenot et Scudéry (1633 et 1634) ; le Railleur, par A. Maréchal (1636), un des premiers compagnons de Molière. Des progrès plus décisifs sont effectués par les Visionnaires, de Desmarets (1637) et la Belle Plaideuse, de Boisrobert. D’autres, encouragés par le vieux Sorel qui, dès 1622, avait engagé la lutte de l’esprit populaire contre le pédantisme nobiliaire, par son Histoire comique de Francion et son Berger extravagant, accueillent sur la scène des bourgeois et des manants,