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raient pu inventer un vice plus abrutissant pour l’intelligence des enfants, plus corrupteur de leurs instincts, plus destructeur de leur organisme, que le travail dans l’atmosphère viciée de l’atelier capitaliste.

Notre époque est, dit-on, le siècle du travail ; il est, en effet, le siècle de la douleur, de la misère et de la corruption.

Et cependant les philosophes, les économistes bourgeois, depuis le péniblement confus Auguste Comte, jusqu’au ridiculement clair Leroy-Beaulieu ; les gens de lettres bourgeois, depuis le charlatanesquement romantique Victor Hugo, jusqu’au naïvement grotesque Paul de Kock, tous ont entonné les chants nauséabonds en l’honneur du dieu Progrès, le fils aîné du Travail. À les entendre, le bonheur allait régner sur la terre ; déjà on en sentait la venue. Ils allaient dans les siècles passés fouiller la poussière et les misères féodales pour rapporter de sombres repoussoirs aux délices des temps présents. — Nous ont-ils fatigués, ces repus, ces satisfaits, naguère encore membres de la domesticité des grands seigneurs, aujourd’hui valets de plume de la bourgeoisie, grassement rentés ; nous ont-ils fatigués avec le paysan du rhétoricien La Bruyère ? Eh bien ! voici le brillant tableau des jouissances prolétariennes en l’an de Progrès capitaliste 1840, peint par l’un des leurs, par le Dr Villermé, membre de l’Institut, le même qui, en 1848, fit partie de cette société de savants (Thiers, Cousin, Passy, Blanqui l’académicien, en étaient), qui propagea dans les masses les sottises de l’économie et de la morale bourgeoises.