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obligeait Hugo à mentir impudemment.

Le 28 août 1848, Victor Hugo, pour exciter les conseils de guerre à condamner sans pitié, dénonce les vaincus comme des « pauvres qui n’eurent qu’une idée : dépouiller les riches. » Deux mois auparavant, les pillards de juin avaient envahi sa maison. Ils savaient qu’il était « un des soixante représentants envoyés par la Constituante pour réprimer l’insurrection et diriger les colonnes d’attaques. » Ils fouillèrent les appartements pour chercher des armes ; ils virent pendu au mur « un yatagan turc, dont la poignée et le fourreau étaient en argent massif... rangés sur une table, des bijoux, des cachets précieux en or et en argent... quand ils furent partis, on constata... que ces mains noires de poudre n’avaient touché à rien. Pas un objet précieux ne manquait. » Ce sont là les propres paroles de Victor Hugo, narrant le sac de sa maison par les pillards de juin. Mais pour raconter la scène, il attendit que les conseils de guerre eussent terminé leur œuvre de répression ; il était alors exilé. — Victor Hugo reste toujours le même, au milieu des circonstances les plus diverses : pendant la restauration légitimiste, il insulte Napoléon, qui l’enthousiasme, pendant la réaction bourgeoise, il calomnie les insurgés, dont il admire les actes de délicate probité.

Une étrange fatalité pesa sur Victor Hugo ; toute sa vie, il fut condamné à dire et à écrire le contraire de ce qu’il pensait et ressentait.

En exil, pour plaire à son entourage, il pérora sur la liberté de la presse, de la parole et bien d’autres