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cour, le faisait manger à sa table, et prenait un plaisir extrême à s’entretenir avec lui. Enfin, pour se l’attacher d’une manière plus particulière, il le fit son chapelain, et le choisit pour son confesseur. Robert de Sorbonne étant devenu chanoine de Cambrai vers 1251, réfléchit sur les peines qu’il avait eues pour parvenir à être docteur, et résolut de faciliter les études aux pauvres écoliers. Il crut que le moyen le plus convenable et le plus avantageux était de former une société d’ecclésiastiques séculiers, qui, vivant en commun, et ayant les choses nécessaires à la vie, ne fussent plus occupés que de l’étude, et enseignassent gratuitement. Tous ses amis approuvèrent son dessein, et offrirent de l’aider de leurs biens et de leurs conseils. Ceux d’entre eux qui contribuèrent le plus à l’établissement projeté furent Guillaume de Brai, doyen et official de Laon, archidiacre de Reims, puis cardinal ; Robert de Douai, chanoine de Senlis, et médecin de la reine Marguerite de Provence, femme de saint Louis ; Geoffroi de Bar, doyen de l’église de Paris, puis cardinal ; et Guillaume de Chartres, chapelain du roi saint Louis, et chanoine de Saint-Quentin. Robert de Sorbonne, aidé de leurs secours, fonda, en 1253, le célèbre collège qui porte son nom. Il rassembla alors d’habiles professeurs ; choisit, entre les écoliers, ceux qui lui parurent avoir le plus de piété et de dispositions, et logea sa communauté dans la rue des Deux-Portes, vis-à-vis le palais des Thermes. Telle est l’origine du fameux collège de Sorbonne, qui a servi de modèle à tous les autres collèges ; car avant ce temps-là il n’y avait en Europe aucune communauté où les séculiers vécussent et enseignassent en commun. Son établissement avait deux objets, la théologie ou l’étude de la religion, et les arts. Il commença par la théologie, et voulut que son collège fût principalement destiné à la gloire de la religion. Il le composa de docteurs et de bacheliers en théologie. Ceux qui ont dit, d’après du Boulai, que la maison de Sorbonne ne fut d’abord fondée que pour seize pauvres boursiers, se sont trompés. On voit, par les réglemens du fondateur, qu’il y avait, dès le commencement de la fondation, des docteurs, des bacheliers boursiers, et de pauvres étudians, tels qu’il y en a encore aujourd’hui. Il est constant d’ailleurs que le nombre de boursiers n’a jamais été fixé et déterminé, mais qu’il était plus ou moins grand, à proportion des revenus du collège. Les réglemens supposent aussi, en plusieurs articles, que les premiers Sorbonistes étaient plus de trente. Le registre de procureur, du temps de Robert de Sorbon, met trente-six couverts d’argent pour le service journalier des repas ; et dans une lettre datée de l’an 1258, cinq ans après la fondation, un Sorboniste mande à un autre Sorboniste de ses amis, que l’on a fait en Sorbonne une demeure charmante, et que, sans compter les appartemens d’en bas, il y aura vingt chambres très-belles. « Facta est in domo nostrâ habitatio pulcherrima, in qua absque inferioribus habitaculis erunt viginti cameræ valde bonæ, quarum unam libenter haberetis, si morari Parisiis constanti animo proponeretis. » Tous les autres anciens monumens que l’on conservait en Sorbonne renversent entièrement cette imagination de du Boulai. Mais ce n’est pas ici le lieu d’entrer dans un plus long détail. Robert de Sorbonne ordonna que l’on ne recevrait, pour être membre de son collège, que des hôtes et des associés, socii et hospites, permettant d’en recevoir de quelque pays et de quelque nation que l’on fût. Pour être hôte, hospes, il fallait 1o être bachelier ; 2o soutenir une thèse, appelée, de son nom, Robertine, et être reçu à la pluralité des suffrages dans trois scrutins différens. Ces hospes ont subsisté jusqu’à la fin. Ils étaient nourris et logés dans la maison, comme les autres docteurs et bacheliers, avaient droit d’étudier dans la bibliothèque, sans cependant en avoir la clef, et jouissaient de tous les autres droits et prérogatives, excepté qu’ils n’ont point de voix dans les assemblées, et qu’ils sont obligés de sortir de la maison lorsqu’ils sont docteurs. Pour être associé, socius, il fallait, outre la Robertine, et les trois scrutins des hospes, professer encore gratuitement un cours de philosophie, et être reçu dans deux autres scrutins. C’est une erreur de croire que l’on pouvait suppléer au cours de philosophie, en prê-