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LA PERLE DE CANDELAIR

ces gens, qui riraient bien en dessous, tout en ayant l’air de me plaindre, s’ils savaient que, faute d’un habit, je suis à regarder de loin mon paradis perdu et à pleurer sur lui.

Il se secoua un peu brusquement puis rentra en toute hâte.

― Qu’est-ce qui a pu te retenir si tard ? s’écria Mme Daubrée, du plus loin qu’elle le vit. Je pense bien que tu ne vas pas nous faire faux bond comme cela à tous les dîners ?

Ton oncle ne serait pas content ! Tu sais qu’il tient à ce qu’on ne manque pas aux heures des repas.

La bonne dame aurait continué longtemps de la sorte si Étienne, peu disposé ce soir-là à écouter l’éternelle litanie, ne l’eût interrompue en la priant de le faire souper et en prenant le dé de la conversation pour l’empêcher de le tenir.

— J’avais très-mal de tête, tantôt, dit-il, et pour tâcher de le perdre j’ai été si loin dans la campagne que je n’ai pu, quelque diligence que j’aie faite au retour, arriver plus vite. La course m’a réussi, car je vous reviens affamé, quoique à moitié endormi.

― Tu feras bien d’aller te coucher vite, alors, dit Mme Daubrée, afin que j’en puisse faire autant. — Oh ! les enfants, comme cela dérange dans une maison, murmurait à part elle la grand❜mère qui moins que jamais pouvait s’habituer aux façons de vivre de son petit-fils.

Étienne ne s’endormit pas aussi vite que ses paroles l’auraient pu faire croire ; il se tourna, se retourna longtemps dans son lit avant de fermer les yeux. Sa grande préoccupation était pour le moment de sortir à son hon-