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L’ONCLE ISIDORE

Elle était dans une de ces mauvaises passes le jour où, courant après un colifichet, elle rencontra Étienne.

Comme Mariette, qui pouvait être crue sur parole en cette occurrence, lui avait dit qu’il était un fils de bonne maison ; comme ses yeux lui avaient rendu du jeune homme un témoignage satisfaisant, et que sa mise fort simple, peut-être un peu négligée, n’avait rien qui sentît l’étudiant ni qui dénotât le fantaisiste, elle pensa qu’il ne lui serait peut-être pas impossible d’apprivoiser ce sauvage ; qu’au reste, il avait l’air beaucoup trop intelligent pour qu’elle négligeât de l’attirer dans sa maison ; enfin Étienne, n’allant chez personne, ce lui serait un succès de vanité de le recevoir chez elle.

Elle s’était bien aperçue qu’il avait avec lui un chien d’une laideur remarquable, quelque chose comme un hideux barbet d’aveugle ; mais cette dissonance, la seule d’ailleurs qu’elle eût remarquée, n’avait pas nui à notre héros. Au contraire, Lou-Pitiou avait quelque chose de si particulier et de si caractéristique, que son image revint souvent à l’esprit de la jeune femme et l’obligea, malgré elle, à penser à son maître.

Celui-ci, d’ailleurs, n’avait point une trop mauvaise position : Du premier coup d’œil on l’avait classé parmi les Parisiens nés, transplantés ou égarés en province.

Mme Malsauge songea bientôt au moyen d’apprivoiser ce nouveau paysan du Danube, et se trouva fort embarrassée quand elle eût appris, par des jeunes gens qui connaissaient Étienne, pour avoir été au collège avec lui, que déjà, à cette époque, il n’avait pas de camarade ; que, depuis, il n’avait eu des relations avec personne, et ne se trouvait, par conséquent, avoir aucun ami qui pût