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LA PERLE DE CANDELAIR

neveu. Levant sur lui ses yeux sévères qu’il avait jusque-là tenus attachés sur la table, il dit d’une voix brusque :

— Ah ! c’est vous, monsieur le mauvais sujet ! c’est bien ; vous voilà de nouveau sous notre aile. Espérons que vous n’y continuerez pas les dettes si bien commencées à Paris.

— Il est sûr, mon oncle, reprit le jeune homme, que si la Providence m’avait donné chaque jour une soupe aussi bonne que celle-là — il prenait avec sa cuiller le potage qu’on venait de lui servir — à l’heure qu’il est je ne devrais rien à personne, et je ne vous mettrais pas dans la dure nécessité de me faire de la morale.

Étienne, là-dessus, se mit à déjeuner avec un calme parfait, au moins en apparence, tandis que son oncle, trouvant l’occasion bonne, entamait le discours qu’il avait préparé de longue main. Mais le jeune homme s’était si bien promis de rester calme et indifférent, que n’eût été son attitude respectueuse, on eût juré qu’il n’entendait pas un mot de ce qu’on lui disait.

La grand’mère écoutait avec l’attention religieuse qu’elle prêtait aux sermons de son curé. Elle pensait, à part elle, qu’il fallait qu’Isidore eût cent fois raison pour qu’Étienne reçût ainsi, en toute humilité, les reproches que lui adressait son oncle. Toutefois, en se reportant à son anxiété du matin, elle était fort soulagée de voir les choses prendre un chemin si parfaitement uni.

Le déjeuner et la morale touchaient à leur fin sans autre encombre, lorsque deux personnes firent à la fois irruption dans la salle à manger. D’un côté Lou-Pitiou dont la retraite avait été découverte, de l’autre la vieille