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LA PERLE DE CANDELAIR

Mme Daubrée, sa vue baissant avec l’âge, n’avait pas été une des dernières à rechercher l’ouvrière ; mais elle était si courue, que l’influence même de M. l’abbé, qui avait en grande estime les habitants de la Chartreuse, dut être mise en réquisition pour obtenir cinq ou six journées par mois, pendant lesquelles Mme Daubrée, aussi fière qu’heureuse de ce résultat, mettait de cinq heures du matin à huit heures du soir, le temps de Mariette à profit.

Mariette était petite, brune, vêtue tout à fait comme les grisettes du Midi avant l’invasion des toilettes parisiennes. Elle portait une robe d’indienne de couleur sombre, avec un large tablier de cotonnade à mille petits carreaux d’un bleu gris très-foncé. Un mouchoir de cou dans lequel le rouge dominait, se croisait sur sa poitrine, les deux pointes en étaient maintenues par la ceinture et les cordons du tablier.

Elle était coiffée d’un mouchoir à grands carreaux de couleurs éclatantes qui ne laissait passer sur ses tempes qu’une partie de ses bandeaux bien lissés et le bout d’une petite oreille ornée de ces larges pendants qu’on appelle des « roues », parce que ce sont de grands cercles d’or relevés par une boule de même métal juste à l’endroit du fermoir.

La façon dont on traite ce petit monde d’ouvrières dans Candelair et dans les environs, n’est pas tout à fait la même que celle dont on en use à Paris et dans maintes grandes villes.

À Candelair, la couturière ne dîne généralement pas à la cuisine ; elle a dans presque toutes les maisons bourgeoises son couvert mis à la table des maîtres, seulement