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LA PERLE DE CANDELAIR

dont la gravité triste n’eût certes pas échappé à une intelligence plus développée ou à un esprit moins prévenu :

— Allez vous coucher, ma mère. Discuter n’éclaircit rien : les explications ne peuvent amener entre nous aucune lumière. Reposez-vous donc, et soyez, quoi qu’il arrive, bien persuadée de ma tendresse pour vous.

— Tu ne partiras pas au moins, pria Mme Daubrée en joignant les mains devant le jeune homme. Et comme celui-ci hésitait, elle ajouta : Je t’en prie.

Puisque tu ne peux rien faire à Paris sans avoir la santé, reprends au moins la santé ici. Hélas ! je ne puis te donner autre chose, ajouta-t-elle avec un triste soupir de regret ; laisse-moi te donner cela.

Le cœur, en ce moment, avait pris chez la grand❜mère une telle avance sur l’intelligence, que le jeune homme en vint à se demander si cette pauvre femme, dont toute la vie n’avait été qu’une longue et sublime abnégation, n’était pas plus méritante encore qu’il ne l’avait supposé jusque-là. Peut-être avait-elle conscience de la valeur en même temps que de l’étendue de son sacrifice.

Embrassant tout le passé d’un coup d’œil, la vie de sa grand’mère lui parut si sublime, qu’il ne permit ni à son jugement, ni à l’esprit d’analyse qu’il portait en lui, largement développé, d’aller trop au fond des choses. Il préféra, tant il voulait encore croire à quelque chose dans ce lieu où tout lui avait semblé hostile, il préféra en rester sur son illusion, sur ce beau rêve de la jeunesse toujours heureuse de prêter les grandes et muettes vertus à ceux qui les entourent.

— Allons, mère, je resterai, puisque cela vous rend