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LA PERLE DE CANDELAIR

— Fais bien doucement, mon Étienne. Ton oncle s’est couché il y a quelque temps seulement ; tu sais combien il faut peu de chose pour le réveiller ! Il est si bon, ce pauvre Isidore, qu’on ne saurait prendre trop de soins pour ne pas lui déplaire.

Puis, continua-t-elle, je suis bien aise de pouvoir retarder jusqu’à demain la verte réprimande qu’il ne peut manquer de t’adresser. J’espère d’ici là t’avoir préparé à l’écouter avec la respectueuse reconnaissance que tu lui dois.

Viens, mon enfant, que je te fasse souper avant de te conduire à ta chambre.

Étienne soupa, en effet, mais lestement, comme pour se dérober aux reproches de sa grand’mère, dont la voix douce et bonne, dont l’attitude craintive et peinée lui faisaient éprouver comme un remords, alors que son esprit et son cœur lui disaient, dans leur franchise, que non seulement on n’avait rien à lui reprocher, mais qu’au contraire si quelqu’un devait se plaindre, personne autre que lui n’en avait le droit.

Mme veuve Daubrée continuait toujours de cette voix dolente et compassée des vieilles gens qui sont en plein dans leur idée fixe :

— Pourquoi donc, mon pauvre Etienne, as-tu fait des dettes au lieu de vivre de ce que ton oncle te donnait, modestement, tranquillement, comme nous le faisons ici ? Pourquoi l’as-tu mécontenté en perdant ton temps au lieu de te faire recevoir avocat, comme nous le désirions ?

Il faut, vois-tu, que tu aies fait quelque mauvaise connaissance ; que tu te sois mis à fréquenter des gens dé-