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LA PERLE DE CANDELAIR

dans la maison, avec la famille ; il était toujours hors du logis.

Les moins malveillants, sans appuyer leurs convictions sur d’anciens souvenirs, murmuraient à l’oreille les uns des autres :

— Si la grand’mère en dit long comme cela, c’est qu’il y en a cent fois autant ; la tendresse et l’aveuglement des parents ne sont-ils pas proverbiaux !

Grâce aux plaintes, aux soupirs, aux réticences, aux regards de mater dolorosa de la brave femme, qui aimait son petit-fils de tout son cœur, le pauvre enfant eut, dans sa ville natale, la plus triste de toutes les réputations ; une de ces réputations fausses du tout au tout, et qui n’en pèsent pas moins sur la vie entière d’un homme.

En recevant la lettre de sa grand’mère, Étienne ne fut pas surpris ; il s’y attendait. Quand on a été longtemps et injustement opprimé, on ne croit plus qu’aux mauvaises nouvelles. Il en fut néanmoins douloureusement affecté.

Depuis deux ans et demi, il avait soutenu une lutte au-dessus de ses forces. Un moment, il était tombé brisé, anéanti sous le fardeau ; il avait appelé à son aide avec cette voix déchirante de la jeunesse, qui sent tout un avenir lui échapper, faute d’une main tendue vers elle à l’heure de ses défaillances ; et au lieu d’un secours, à la place d’un encouragement, il recevait une nouvelle douleur ; on mettait une barrière de plus en travers du chemin où il trouvait déjà des difficultés sans nombre.

Il fit néanmoins sa malle avec la fiévreuse ardeur qu’on apporte à un coup de tête. Il arrêta sa place et