Page:Lacroix - La Perle de Candelair.djvu/400

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
392
LA PERLE DE CANDELAIR

arrivée. Elle tenait à ce que tout y eût un air de fête et rappelât à son ami cette première journée qui avait décidé pour elle de la vie entière.

Elle voulait qu’il y eût un gâteau semblable à celui qu’ils avaient mangé, une volaille rôtie de la même façon, sur une nappe bise et rude, toujours, toujours comme autrefois.

Elle ne voulait pas que sa nourrice, sous prétexte de trop bien faire, lui gâtât sa journée ; voilà pourquoi elle était partie de grand matin, afin de tout faire préparer elle-même et devant elle.

Car pour Mariette rien n’avait été changé dans l’affection qui l’attachait à Étienne, son absence, l’agrandissement de sa fortune, l’amour qu’il avait eu pour Mme Hélène, amour qui l’avait si entièrement absorbé qu’il en avait longtemps oublié l’ouvrière, et même son mariage, rien n’avait pu apporter une ombre à sa tendresse ni en échanger la nature.

Toutes les choses qui étaient advenues à M. Jussieux avaient été considérées par elle comme des accidents, ou comme des bienfaits inhérents à sa situation nouvelle. Son mariage et sa décoration lui avaient paru des distinctions honorifiques qu’elle plaçait sur la même ligne, mais rien de plus ; car il lui semblait impossible, à elle, la fille du Midi, que quelqu’un pût arriver à s’emparer de la place qui lui appartenait dans le cœur d’Étienne. C’était absolument comme si un autre homme avait voulu lui demander de reporter sur lui l’amour qu’elle avait pour M. Jussieux.

Donc, malgré qu’elle fût la droiture et la loyauté personnifiées, malgré qu’elle fût honnête jusque dans l’âme,