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L’ONCLE ISIDORE

il se ruinerait comme lui ; il n’en a pas, il fait des dettes.

Tout cela est un peu votre faute, ma sœur ; je ne vous en fais pas un reproche, je sais bien que les grand’mères sont faibles, vous l’avez beaucoup gâté. Ainsi, au lieu de le faire travailler ici pendant ses jours de sorties, légèrement, seulement pour qu’il n’en perdît pas l’habitude, vous le laissiez user ses vêtements et sa chaussure à courir sur les montagnes. C’est là qu’il a pris l’habitude de la paresse et de la dilapidation : vous voyez aujourd’hui les fruits que cela porte.

Mme Daubrée avoua qu’en effet elle aimait beaucoup l’enfant, et qu’elle pouvait bien avoir à se reprocher un peu de faiblesse à son égard.

— Enfin, ajouta l’oncle Isidore, chacun entend ses devoirs à sa manière. Mon devoir n’est pas de payer les dettes d’un mauvais sujet, qui ne récompense ni vous ni moi des soins que nous lui avons donnés ; mon devoir a été de vous empêcher tous de tomber dans la misère ; je l’ai accompli de mon mieux. À présent que vous et moi nous sommes vieux, que d’un jour à l’autre nous pouvons devenir infirmes, je dois conserver notre asile et de quoi y vivre. Seriez-vous bien aise que nous fussions dans nos vieux jours, réduits à la charité publique.

Mme Daubrée était retombée sur sa chaise en tenant d’une main le chapeau de son frère, de l’autre sa canne, pendant qu’il mettait méthodiquement ses gants avant de se rendre à son cercle.

— Écoutez, ma sœur, ajouta-t-il comme s’il eût eu pitié de l’abattement où il voyait la pauvre femme ; tout ce que je puis faire pour lui, c’est de lui permettre de