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LE SECRÉTAIRE DU MINISTRE

qui voulût bien chanter avec lui le renouveau qui s’éveillait dans une âme qu’il croyait si complètement éteinte.

Alors il tourna ses regards du côté de Valentine, qui, accoudée dans un angle de la voiture, promenait un œil indifférent et fatigué du voyage sur la campagne, pourtant fort belle, qui se déroulait devant eux.

Étienne fut surpris, pour la première fois à coup sûr depuis son mariage, de l’extrême et constante froideur dans laquelle vivait Valentine. Il s’en aperçut seulement parce que ce jour-là elle n’était pas dans le ton, et la dissonance qui en résultait eut un effet pénible pour M. Jussieux.

Pourtant il essaya de rompre la glace, et, s’adressant à la jeune femme, il lui demanda si elle ne trouvait pas bien beau, bien pittoresque et largement splendide le pays dans lequel ils venaient d’entrer, et qui s’accentuait encore à chaque tour de roue qui les rapprochait de Candelair.

La jeune femme ouvrit ses grands yeux sur les sites quelque peu sauvages et très-heurtés de tons au milieu desquels ils étaient, puis elle les reporta, légèrement étonnés, sur son mari dont elle ne comprenait pas l’enthousiasme.

Elle lui répondit tranquillement :

— Mais je trouve tout cela fort laid, je vous le jure. Je suis habituée à la campagne bien peignée et correctement unie des environs de Paris, je ne connais qu’elle et ne saurais comprendre d’autres aspects.

M. Jussieux fut péniblement affecté de ce rappel aux choses de l’existence, qui étaient si peu en rapport avec ses impressions du moment ; aussi, pour ne pas conti-