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LA PERLE DE CANDELAIR

joies et des heures heureuses que l’amour seul peut donner.

Alors commença pour Valentine une vie en partie double, deux vies bien distinctes, l’une toute pour le monde, l’autre qui n’était que pour elle.

La part du monde était irréprochable et grande ; la jeune femme ne fit tort à ce souverain absurde, capricieux et cruel, d’aucune des choses qu’elle lui devait.

Mais pour son autre vie, pour sa vie à elle, c’était tout à fait un autre ordre de choses ; nul n’avait eu besoin de lui enseigner tous les sentiers par lesquels elle égarait à plaisir son imagination. Elle était partie de ce principe que si elle avait des devoirs, et ceux-là on ne les lui avait pas laissé ignorer, elle ne pouvait manquer d’avoir aussi des droits, ne fût-ce qu’en raison des lois de l’équilibre ; alors comme personne ne lui avait dit un mot de ce dernier article elle s’était mise toute seule à la recherche de la chose inconnue, comptant sur sa finesse pour la lui faire découvrir.

Valentine a un mari jeune et beau, du moins il lui paraît tel, et cela lui suffit ; mais ce mari la traite fort en petite fille et s’arrête, ma foi ! bien facilement aux apparences. Elle sent qu’elle est toute disposée à aimer si ou voulait bien l’y aider un peu.

Elle n’en est pas encore arrivée à jeter loin, bien loin de celui qui vit à ses côtés, des regards inquiets cherchant l’image d’un rêve que rien ne peut remplacer auprès d’elle.

Non, elle aimerait facilement Étienne, si Étienne songeait à s’en apercevoir, et s’il voulait bien s’occuper d’elle.