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LA PERLE DE CANDELAIR

Étienne avait répandu aux pieds de Mme Hélène cette énergie et cette fougue entière dont le sauvage de Candelair avait fait une si grande provision sur la montagne ; toutes les folles et juvéniles ardeurs de son âme avaient été données à son cher et beau rêve.

Il avait chanté pour elle, et sur tous les tons, la romance de Chérubin à sa marraine.

Il avait parlé, pour son oreille complaisante, cette belle langue enfiévrée de l’amour heureux et jeune qu’on ne parle jamais deux fois dans la même existence.

Il ne pouvait donc plus rien dire, il ne pouvait plus rien entendre non plus. Il était parfaitement mûr pour le mariage, et bien à point pour la vie politique dans laquelle le marquis et Mme Hélène l’avaient poussé avec le soin que l’on met à préparer l’accès de l’hôtel des Invalides à nos gloires fatiguées et tout à fait usées.

Quand Étienne fut présenté, par M. de Ferrettes, à Mlle Valentine de la Vaugellerie, il était correctement vêtu de son irréprochable habit noir, cravaté de blanc, comme pour une visite à la cour. La jeune fille arrêta sur lui son regard calme et clair ; elle le trouva jeune, elle le trouva beau, et quand il se fut retiré du parloir, elle vit encore longtemps la tête énergique, noble et fière d’Étienne Jussieux, qui avait, d’un seul coup, pris sa place dans son imagination.

Elle était fort pieuse, Valentine ; aussi le soir, en faisant sa prière, remercia-t-elle très-sincèrement la Providence, qui était venue la prendre par la main, jusqu’aux pieds des autels, à l’ombre desquels elle vivait, pour la conduire à de telles destinées et pour lui donner un mari si parfaitement accompli.