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LE SECRÉTAIRE DU MINISTRE

ce monde n’ont qu’une durée restreinte, et quand la limite qui leur est assignée est atteinte, il ne reste plus qu’à courber le front devant ce qui est.

Il me quittera, c’est inévitable, et si le marquis m’est venu dire :

« Prenez garde, ne vous laissez pas imposer par les faits ce rôle triste et presque humiliant de la femme abandonnée, » c’est que la menace est là, tout près, et que je n’ai plus grand temps à perdre en vaines réflexions.

Oui, il vaut mieux que ce soit moi qui rompe ; il faut qu’Étienne me doive encore ce que l’on appelle un avenir sérieux ; il est en effet digne à moi de lui imposer une éternelle reconnaissance et je le ferai.

Néanmoins, comme il est dans la nature humaine de ne jamais désespérer entièrement d’elle-même et de se rattacher dans la chute qu’elle fait, du haut de ses espérances, à toutes les branches possibles, Mme Hélène se fit ce calcul, au fond bien vrai :

— Puisque ce malheur de perdre Étienne me doit arriver, il est peut-être en mon pouvoir d’en faire sortir une demi-consolation en ne le perdant pas tout à fait ?

Pour qu’une femme puisse arriver à s’emparer de son cœur, il faut qu’elle soit bien habile ; car je l’ai habitué à des délicatesses de sentiment, à des tendresses sans pareilles. Une femme qui ne saura pas, comme moi, toutes les choses que le monde, la vie et l’expérience enseignent ne prendra jamais en lui la place que j’y tenais.

Allons, puisqu’il le faut, je vais lui chercher moi-même une femme, je la prendrai encore toute jeune, en