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LA PERLE DE CANDELAIR

fût tellement émue de ses discours, sa crainte personnelle aidant, qu’elle en vînt presque d’elle-même au-devant de l’aide qu’il ne demandait qu’à lui prêter.

Mais, quoiqu’elle fût sa nièce et qu’il eût presque toujours vécu auprès d’elle, il ne connaissait pas bien le cœur de la belle Mme Hélène.

Elle serait morte un million de fois plutôt que de s’avouer vaincue.

En voyant cela, et en tacticien habile, le vieillard revint brusquement sur ses pas. Il abandonna ses insinuations pleines de finesse, ses discours tortueux, aussi habiles que spirituellement amenés, laissant à terre, dans un coin, tout son bagage d’homme rompu à la vie des salons, puis il regarda Mme Malsauge bien en face, d’un air calme, tranquille, presque doux, et lui dit comme la chose la plus simple et la plus indifférente du monde :

— Ma bonne amie, je crois qu’il est temps que nous songions sérieusement à marier Étienne.

Mme Hélène prit un air étonné comme si on lui eût parlé d’une chose à laquelle elle aurait été entièrement étrangère, et répondit de sa voix la plus calme :

— Vraiment, cher marquis ; eh ! qu’y puis-je faire, je vous le demande, est-ce que M. Jussieux n’est pas dans les meilleures conditions possibles pour se marier tout seul, quand et comme bon lui semblera ?

— On n’est jamais dans ces conditions, ma chère, reprit le marquis, et plus on est mariable, moins on est en situation de se marier tout seul.

— Ce sont vraiment choses bien trop subtiles pour