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LA PERLE DE CANDELAIR

bien c’est son amour et la satisfaction qu’elle éprouve d’elle ou de celui qu’elle aime, si bien que l’on croirait vraiment que la joie est une chose parfaitement étrangère à sa vie quotidienne et qu’elle ne sait dissimuler son étonnement heureux lorsqu’elle l’y rencontre, on voudra bien m’accorder que cela change étrangement lorsqu’il s’agit d’un chagrin ou d’une douleur.

Alors cet être si frêle et si parfaitement incapable de résister à l’entraînement heureux, se transforme et devient de granit et d’acier, résistant et impénétrable.

Leurs larmes, les femmes les boivent avec une âcre et ardente satisfaction ; on les croirait jalouses de ces perles brillantes, qu’elles dissimulent à tout regard étranger, afin que personne ne puisse se vanter d’y avoir miré sa malveillance ou d’y avoir baigné cette grande indifférence que chacun porte et nourrit en face des douleurs des autres.

Les femmes savent si bien que les chagrins et les anxiétés qu’elles ont en elles feraient, si elles les étalaient au grand jour, la joie de quelques-uns, qu’elles les dévorent, malgré qu’elles en doivent mourir ; car le malheur est le plus subtil de tous les poisons que l’on puisse verser à la femme.

Mme Hélène avait enterré, au plus profond de son cœur, les craintes et les griefs qu’elle avait à propos d’Étienne. Aussi se montra-t-elle tout assouplie dans sa confiance, toute fière de se sentir si forte en face des éventualités que le hasard capricieux pouvait jeter au-devant de ses pas.

M. de Ferrettes examina un grand moment ce sphinx souriant qui ne laissait rien voir de sa vie et de ses sen-