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LE SECRÉTAIRE DU MINISTRE

dans la conscience d’Étienne. Néanmoins il aborda, d’une allure audacieuse et presque juvénile, un peu à la mousquetaire, quoique fortement mitigée par les éléments commerciaux et parlementaires du dix-neuvième siècle, sa propre théorie du mariage, en même temps que les causes qui le portaient à prêcher en sa faveur, alors que son grand âge et son indépendance disaient si hautement le contraire de ses paroles.

— Mon cher Étienne, dit-il en croisant ses jambes l’une sur l’autre et en appuyant ses coudes aux bras de son fauteuil, le don-quichotisme n’est point du tout mon affaire. De toutes les idées qu’il m’a plu caresser depuis que je suis d’âge à me livrer à ce genre d’exercice, celle de refaire le monde, pas plus que celle de régenter la société ne se sont jamais présentées à mon esprit.

Non que je sois d’un pessimisme complet, ni que je trouve que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles.

Non, bien loin de là, je vous assure.

Je me suis bien aperçu, par ci par là, que la femme était souvent volée et le mari de même ;

Que madame, en trompant monsieur, ne faisait que prendre, en cachette et bien petitement, une revanche à laquelle elle avait des droits incontestables.

J’ai souvent vu un honnête homme bercer sur ses genoux un bambin que quelque joli coureur d’aventure avait, de par le fait de madame, fort malhonnêtement introduit au logis.

J’ai assisté plus d’une fois au démembrement d’une belle dot que monsieur faisait ronger, avec une grande satisfaction de vanité, par les filles à la mode, pendant