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LA PERLE DE CANDELAIR

en les acceptant, à ne les point jeter par la fenêtre au bout de huit jours.

D’un autre côté, n’est-ce point aussi une entrave lourde et pénible pour celui qui ne voit dans le mariage qu’une ampleur plus grande à donner à sa fortune ou à sa situation, quand une fois la chose acquise, il s’aperçoit de quel prix il a payé ce développement apporté, par autrui, à sa bourse ou à ses satisfactions de vanité ?

N’est-ce point alors une chose triste autant qu’affligeante de voir le cas que l’on fait de cette liberté vendue par lui et d’entendre secouer cette chaîne dont il a lui-même rivé le dernier anneau à son poignet ?

— Ah ! ah ! je ne dis pas que ce que vous avancez soit entièrement dénué de vérité, reprit le marquis ; MM. les romanciers qui ont, à notre étrange époque, la prétention d’étudier le cœur humain et d’en montrer les sensations, bonnes ou mauvaises, ne feraient pas mieux que vous le compte rendu des petites tortures et vilenies qui habitent l’âme humaine.

— Je ne saurais me marier parce que je trouve, quoiqu’en puissent dire les moralistes de notre époque, que c’est une institution déloyale et malhonnête ; il n’y a de sécurité ni pour l’une ni pour l’autre des deux parties, pas plus du côté de la moralité que de celui de la fortune et de la dignité.

C’est une espèce d’association bâtarde dans laquelle le mari, le maître, est, de par le Code, institué chef de la communauté. Il prend la haute main au chapitre des volontés financières ; il continue, vis-à-vis de sa femme, le rôle de tuteur qu’a joué jusque-là la famille ; ses décisions sont sans appel, tant qu’il sait mettre de son côté