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LA PERLE DE CANDELAIR

moindre hésitation, parce que aucune femme n’a voulu de moi.

En face de cet aveu tout dénué de vanité, Étienne partit d’un franc éclat de rire.

— Ah ! je ne saurais vous croire, répondit enfin le jeune homme, car au taux où sont les maris riches, nobles et ayant une grande situation dans le monde, vous deviez être, au contraire, très-recherché, et la bonne foi que vous mettez à me faire accepter le pieux mensonge qui doit me pousser au gouffre, que vous avez su éviter pour vous-même, est la seule cause de ma très irrespectueuse gaieté.

— Ainsi, vous croyez que je vous trompe ? vous pensez que j’aurais pu, tout en le désirant beaucoup, trouver une femme qui aurait pris mon nom et m’aurait donné une petite place dans son existence ?

— À coup sûr !

— Eh bien, détrompez-vous ; ceci ne me fut jamais possible, même au temps où j’étais tout jeune. Parmi les femmes que j’aurais désirées, que j’aurais très-sérieusement épousées, avec la bonne intention d’être vis-à-vis d’elles un mari sinon modèle, du moins très-convenable, pas une n’a voulu prêter une oreille attentive à mes prières pas plus qu’à mes discours. Quant aux autres, je ne me suis pas très-fortement hâté de leur offrir une position dans le monde, et je suis arrivé ainsi, presque insensiblement, sans qu’il y ait, je vous assure, rien du tout du fait de ma volonté, à un âge où on aurait cru me faire une grande grâce en m’acceptant.

C’est alors que, de mon côté, je n’ai plus voulu tenir d’aucune femme au monde une pareille largesse. Et