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LE SECRÉTAIRE DU MINISTRE

tigue, vous ne la supportez plus que par habitude et convenance.

— Ah ! Hélène, fit M. Jussieux.

— Je le sens, j’en suis persuadée, car jamais mes sentiments ne m’ont trompée, et ils ne sauraient pas davantage le faire en cette circonstance, continua la belle désolée.

Étienne essaya de sourire, pour montrer à son amie combien ses accusations avaient peu de portée ; mais sa tentative fut vaine et sa bouche resta sérieuse quoi qu’il en eût.

— Je sais bien, reprit Mme Hélène, que j’ai quelques années de plus que vous, et qu’il arrive un moment où cela devient, pour une femme, un tort réel, un tort sérieux ; je sais bien aussi que ma tendresse pour vous est vieillie de dix années, et cela peut lui être un défaut inguérissable, un mal sans remède.

— Enfant ! que vous êtes savante à vous faire de la peine, murmura Étienne, qui était sérieusement affligé de l’examen de conscience que lui faisait faire, bien malgré lui, Mme Malsauge.

— Non, je suis vraie, vous le savez bien ; vous le savez avant moi, et vous comprenez, n’est-ce pas, que si peu que j’aie le droit de me plaindre, je ne saurais y résister, dit-elle, la voix chargée de larmes.

— Hélène ! Hélène ! fit Étienne.

— Oui, je le sais, vous êtes libre, entièrement libre, et certes ce n’est pas ce que je vous conteste ; vous pouvez chercher, où bon vous semblera, un bonheur plus de votre âge, et une situation plus légale que celle que vous fait mon affection. Je sais que vous êtes en droit,