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LE SECRÉTAIRE DU MINISTRE

un sentier plus frayé, et s’est apprise à marcher de compagnie avec le reste des humains.

À Paris, au faubourg et dans les salons officiels, la vaporeuse Mme Hélène ne s’est plus trouvée, comme sur la montagne, une réalité d’autant plus admirable et charmante qu’elle était seule, mais absolument toute seule de son espèce.

À Paris, et surtout dans le monde dont les portes furent ouvertes au secrétaire de M. Malsauge, il y a beaucoup de femmes charmantes, tout aussi éthérées que l’était Mme Hélène, et qui ne demandent qu’un autel digne d’elles pour s’y installer en divinités et des fervents pour s’y faire adorer.

Le système des comparaisons ne détacha point Étienne de Mme Malsauge ; il était trop et surtout trop bien épris pour tomber dans des idées vulgaires qui lui auraient permis de mettre la première idole venue à la place de l’idole choisie, dans le sanctuaire que ses ardentes amours de la vingtième année s’étaient plu à lui élever dans son cœur.

Non, rien de vulgaire ne l’avait envahi.

Mais un calme relatif s’était fait un peu chaque jour. Le sauvage avait appris à vivre ; le lion s’était fait au langage de tout le monde, on n’avait plus idée de ses rugissements et nul ne pouvait se vanter d’avoir vu les griffes du seigneur à la grosse tête.

Mme Malsauge avait su trouver le chemin du cœur de M. Jussieux à une époque où ce cœur susceptible, indomptable et farouche, ne demandait qu’à se donner, tout en étant effrayé de l’idée de se laisser prendre et conduire.