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L’ONCLE ISIDORE

que, j’aurai la satisfaction de la voir vendre aux enchères par ton bon ami Souillard.

Chargeant alors le chien sur ses bras, elle traversa la cour de l’air d’une sybille qui vient de rendre un arrêt plein de malédiction.

— Le chien est à moi, vous êtes tous témoins qu’il me l’a donné, s’écria-t-elle en se retournant sur la première marche de pierre qui conduisait à sa maison, superbe comme une reine sur les degrés de son trône.

— Oui oui ! Mariette, il est à toi ; nous avons tous entendu, s’écria en masse le cercle populaire.

La popularité est chose changeante. À cette heure, on applaudissait Mariette, voire même Lou-Pitiou, et l’on sifflait Thomas ; s’il avait eu le malheur de vouloir tenir tête à la jeune fille, on l’aurait lapidé.

L’aubergiste rentra chez lui pâle, tremblant, se soutenant à peine. Il sentait qu’il nageait en plein dans sa ruine, et la prédiction de Mariette, faite ainsi, tout haut, sur le pavé de Candelair, l’avait atterré : « On vendra ta baraque à l’enchère ! »

À Candelair, comme dans tout le Midi, on est superstitieux, et Thomas qui l’était plus que personne, dans le pays, considérait les paroles de la jeune fille comme le premier coup de cloche de l’agonie de sa fortune et de sa considération.

Au moment où l’ouvrière montait chez elle, Mme Malsauge, en compagnie du marquis de Ferrettes, passait en voiture au petit pas.

Elle quittait aussi Candelair ; mais comme elle craignait les pavés, elle avait voulu, quitte à se rattraper