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LA PERLE DE CANDELAIR

toute rouge d’émotion, moitié de contentement, moitié de crainte. Elle attendait qu’Étienne s’expliquât, car elle sentait bien qu’il fallait qu’il fût arrivé quelque chose d’extraordinaire à son ami pour qu’il parlât comme il le faisait et pour qu’il lui fût possible de disposer d’une aussi grosse somme.

Une idée traversa tout-à-coup son esprit.

M. Letourneur est mort ? s’écria-t-elle en arrêtant ses yeux questionneurs sur Étienne.

— Non, vraiment, reprit-il, Dieu merci ; mon oncle se porte à merveille, mais j’ai une position, je retourne à Paris.

— Vous me quittez, dit alors la jeune fille d’une voix brisée par l’émotion. Reprenez cet argent, monsieur Étienne ; si je suis seule, je n’ai besoin de rien, et je n’aurai jamais besoin de rien ni de personne tant que la Providence me conservera ces doigts-là.

Elle élevait en l’air sa main brune et fluette. Étienne s’en empara de nouveau, la présenta à ses lèvres en lui disant :

— Ces doigts-là sont à moi, ma mignonne, et vous, pas plus qu’eux, n’avez le droit de me désobéir. Je ne te rends pas ta liberté, Mariette, je pars parce que mon avenir est à Paris, mais je te laisse ici comme une chose à moi, pour soigner ma grand’mère et me dire s’il venait à lui manquer quelque chose ; en un mot, pour me remplacer auprès d’elle et pour me garder Lou-Pitiou, que je vais aller acheter à Thomas, et qui restera chez toi.

Mariette avait le cœur gros, un peu moins peut-être qu’aux premières paroles dites par Étienne ; il faut dire