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L’ONCLE ISIDORE

— Encore ? Plus rien ! répondit vivement Mariette. Être ma maîtresse et vous voir, quel autre souhait puis-je former ?

— Combien gagnes-tu par an ? demanda le jeune homme, qui n’avait déjà plus l’air de penser au rêve de Mariette.

La jeune fille le regarda toute surprise ; elle ne comprenait rien à cette façon de causer. Elle s’empressa néanmoins de lui répondre ; elle avait si grand’peur de le mécontenter !

— Mais beaucoup d’argent tous les jours douze sous. Je dis tous les jours, parce que je travaille souvent chez nous, le soir, après ma journée en ville. Je m’arrange ainsi pour que mes dimanches et mes fêtes soient gagnés par la semaine.

— Que peux-tu faire ? dit Étienne, qui n’osa pas achever sa pensée il trouvait, et avec raison, le total de ces douze sous pendant 365 jours une chose si misérable !

— Je me fais brave. Mon père et ma mère me laissent disposer de presque tout ce que je gagne ; ils sont si bons pour moi !

— Tu crois que tu arriverais à te faire un atelier si tu avais devant toi le gain d’une année ?

— Très-largement, répondit-elle avec un geste charmant, car je gagne deux cent vingt, quelquefois deux cent cinquante francs. Pour Candelair c’est une grosse somme.

— Eh bien ! en voilà cinq cents, reprit Étienne en les mettant dans la poche du tablier de la jeune fille. À dater d’aujourd’hui, tu n’iras plus travailler chez personne.

Mariette avait perdu la parole ; elle restait muette,