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L’ONCLE ISIDORE

Mariette s’en aperçut bien vite.

— Vous avez un chagrin, Étienne, pourquoi ne me le dites-vous pas ? demanda-t-elle.

— Non, je n’ai rien, reprit le jeune homme, rien qui me chagrine, mais attends que nous soyons là-bas, ici je serais incapable de parler.

— Comme vous voudrez, répondit-elle en attachant le regard de ses grands yeux noirs et caressants sur le jeune homme.

Ils continuèrent à marcher, presque sans se parler, en se regardant affectueusement.

De la belle joie du premier dimanche plus rien ne restait pourtant ils étaient heureux.

Ils arrivèrent enfin. Mariette commençait à avoir le cœur gros ; il planait au-dessus d’elle comme une menace. Elle ne se rendait pas bien compte de ce qu’elle éprouvait ; mais elle sentait qu’elle allait pleurer.

Quand elle revit le grand pré, la maison toute pleine de giroflées en fleurs, qui faisaient de chaque lézarde un vase fleuri, quand elle vit sur le pas de la porte sa nourrice qui filait sa laine au soleil, son chat sur les genoux, ses poules autour de son cotillon, elle se trouva gaie, libre, légère. Étienne même souriait ; il ne manquait plus rien à son bonheur.

Il était déjà tard ce jour-là ; il fallait donc se presser un peu pour faire dîner les enfants ; aussi la nourrice se mit-elle vivement en cuisine, pendant qu’Étienne, qui n’avait plus besoin qu’on lui fît les honneurs du logis, entraînait sur le banc, au bout de la grande allée du jardin, Mariette, qui le suivait de fort bonne grâce.