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L’ONCLE ISIDORE

Qu’entends-tu par là ? Que j’ai des écus à revendre, n’est-ce pas ? Que je ne sais que faire de mon argent peut-être ? C’est quelqu’un, des mauvais sujets que tu fréquentes, qui t’a soufflé cela à l’oreille pour te donner des idées de dépenses, comme si tu n’avais pas assez de celles qui te sont propres.

— Mon oncle, il n’y a dans mes paroles rien de ce que vous supposez, je sais seulement que vous êtes à votre aise et que vos revenus vous permettent de ne pas vous imposer des privations et de laisser prendre quelque repos à ma mère, qui en a d’autant plus besoin qu’il y a plus longtemps qu’elle travaille.

— Je te vois venir : tu es un ingrat, dit l’oncle Isidore, et tu me dis tout cela pour ne pas me venir en aide. Je suis gêné pourtant, bien gêné ! soupira le vieillard, et encore cet avocat qu’il me faudra payer, cet avocat qui m’a conseillé, qui va me défendre dans le procès que tu m’as suscité.

— Comment, mon oncle, quel procès ?

— Il n’y a pas plus sourd que celui qui ne veut pas entendre, reprit M. Letourneur de sa voix aigre et malveillante ; c’est pour me laisser tout seul, livré aux ennemis que tu m’as fait, que tu ne veux pas avoir l’air de me comprendre.

— Je vous assure, mon oncle, tenta de dire Étienne.

— Eh ! Thomas ! reprit vivement l’oncle Isidore, se serait-il permis de s’attaquer à moi, à moi, Isidore Letourneur, qui n’ai jamais eu de procès pendant le cours de ma longue existence, si le petit-fils de ma sœur, mon propre neveu, ne s’était pas abaissé jusqu’à lui prendre une de ses bêtes ?