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L’ONCLE ISIDORE

— Quant à vos appointements, reprit M. Malsauge, M. de Ferrettes s’est réservé de traiter cette question ; c’est un homme auquel nous devons, l’un et l’autre, trop d’égards pour nous permettre d’aller à l’encontre de sa volonté. Cependant, comme un jeune homme de vingt ans ne peut pas quitter, même Candelair, sans avoir quelques dettes à payer et quelques souvenirs à laisser, voilà pour les frais de déplacement. Voyons, ne soyez pas interdit, je sais ce que c’est. Je ne suis pas encore arrivé à l’âge du marquis.

— Mon Dieu, monsieur, je dois avouer dans la plus entière sincérité, que je n’ai pas l’ombre d’une dette : n’en fait pas qui veut ! ajouta Étienne en souriant.

— Ah ! c’est bien autre chose alors, dit M. Malsauge ; je vous donnais cent louis ; c’est le double qu’il vous faut, mon cher enfant.

Et joignant le geste à la parole, il remit au jeune homme deux cents louis roulés dans un papier satiné, parfumé, un papier de petite maîtresse.

— Vous ne me comprenez pas ? Eh bien ! asseyez-vous encore un instant, et écoutez-moi ; vous verrez que mon oncle ne vous a pas fait le secrétaire d’un homme par trop inintelligent pour comprendre la jeunesse : — Faire des dettes, c’est se donner du mal pour jouir ; mais c’est déjà jouir. On doit, il est vrai, mais on a vécu, et l’on sait ce que valent les choses, puisqu’on les a possédées ; tandis que ne pouvoir faire des dettes, c’est se créer des désirs énormes, c’est tout vouloir, parce qu’on ne peut rien avoir ; c’est creuser en soi des abîmes sans fond.

Les dettes ont un chiffre ; quand on en sait le total, c’est une chose à demi-réglée ; mais des désirs de vingt