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L’ONCLE ISIDORE

fièrement les brûlures ardentes, dont on baise les épines, dont on adore toutes les manifestations !

C’était bien là le cas d’Étienne.

Il avait voulu rompre avec le rêve, avec cette énervante mais enivrante vie de l’imagination ; il avait même tenté les premiers pas dans cette voie, il les avait franchement faits, sans regarder en arrière, sans adresser un soupir de regret à ce qu’il abandonnait, et voilà que le rêve venait de lui-même se mettre en travers de son chemin, qu’il le prenait par la main, pour l’arracher à sa route nouvelle, et qu’il lui montrait Paris, le luxe, l’indépendance, la richesse et le bonheur tout à la fois.

Étienne était trop affamé de toutes ces joies, lui dont les instincts avaient été de tout temps sollicités par les élégances de la grande ville, lui qui trouvait deux fois femme la femme vêtue de satin, lui dont l’esprit vivait dans les palais enchantés, créés par ses jeunes désirs, pour trouver la force d’y résister.

Il suivit donc le marquis ému, charmé, tremblant encore à l’idée que tout cela pouvait n’être qu’une illusion, comme ses illusions d’autrefois, et craignant le réveil.

M. de Ferrettes, marchant toujours de son pas alerte, entraînait avec lui le jeune homme. Ils traversèrent ainsi le jardin où le vieillard aperçut Mme Daubrée. Il fut prendre congé d’elle avec cette grâce sans pareille et cette exquise politesse que l’on ne trouve plus que chez les vieux gentilshommes.

La vieille dame, très-flattée de voir son cher enfant sortir dans la ville en si bonne compagnie, attacha sur le marquis un regard d’une si grande éloquence, qu’à lui seul il lui gagna les sympathies de M. de Ferrettes.