Page:Lacroix - La Perle de Candelair.djvu/223

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
215
L’ONCLE ISIDORE

Gagné par les regards affectueux de Mariette, ainsi que par le charme pénétrant qui s’échappe des jeunes femmes, Étienne appuya ses lèvres sur le cou de la jeune fille et s’abandonna à l’enivrement d’un long et dangereux baiser, sous lequel l’ouvrière frissonna de bonheur, depuis la racine de ses cheveux noirs jusqu’à la plante de ses pieds mutins qui froissaient le sable de l’allée.

Tous deux gardaient le silence, mais Étienne retomba bientôt dans ses tristes pensées ; ce fut avec un soupir qu’il répondit aux dernières paroles de Mariette :

— Je voudrais bien trouver le moyen d’être heureux ! hélas ! je n’ai même plus la force de le désirer.

— Désirer n’est rien, monsieur Étienne, répliqua la jeune fille, c’est vouloir qu’il faut.

Étienne la regarda étonné.

— Vous êtes un homme, continua-t-elle d’une voix émue, vous êtes un savant ; vous serez riche un jour.

— Ah ! ma chère amie, de tout cela rien n’est vrai ; je ne suis pas un homme, puisque je n’ai pas de courage ; je ne suis pas un savant, puisque je ne sais point t’aimer, car je te fais souvent pleurer. Quant à être riche, cela est en si complet désaccord avec mon état actuel, que ta prophétie me donne envie de rire.

Mariette fut prise d’un accès d’amour fou : son affection grandissait avec les obstacles.

Elle sentait, en effet, que l’homme qu’elle aimait ne la savait point aimer ; qu’il manquait de courage et qu’il était pauvre.

Obéissant aussitôt à ses impressions confuses, elle qui jusque-là avait plutôt subi qu’appelé les caresses du